La carambole

« Je les avais retrouvés malgré moi, malgré eux enfin malgré nous. J’avais pris la décision de revenir sur mes pas, loin des révoltes de jadis, du temps qui passait, de cette soif d’idéaux en conformité à mes aspirations esthétiques et politiques ; je voulais croire, encore, à une certaine morale intellectuelle.
J’avais envie d’acheter de la terre pour tous les réunir, les morts et les vivants, pour les regarder vivre au travers d’un prisme, d’un murmure ou d’éclats de voix, de rires et de fragments de vie. [...]
Pourquoi aurait-il fallu que je ne cède, comme beaucoup, au besoin de parler de moi ? N’était-ce pas là, la nécessité de l’auteur ? J’aurais laissé à chacun le droit de décider, si je n’avais pas, moi-même tenu à embarquer, et lecteurs et fantômes sur ma nef...
J’étais à l’âge des souvenirs que l’on décrivait comme des fragments de mémoires, à l’âge ou les heures commençaient à compter ; enfin, j’étais à l’âge des vendanges, celui de mon automne. »